texte_Katja Brunner
traduction_Marina Skalova
mise en scène_Anna Van Brée
on est dans une église et sur le banc des personnages il y a le fils AH NON il est suicidé le hamster AH NON il est suicidé la mère la sœur la mort les vers les larves tout le monde tiré à quatre épingles les invitées* regardent le cercueil et comptent les pellicules sur la robe de la sœur tout le monde a fait couler son mascara sur ses cernes et puis qui essuie les restes PERSONNE il faut changer l’état physique de notre chagrin avant il était liquide maintenant il est aussi gazeux que la couche d’ozone ça fait de la pollution le garçon il aurait mieux fait de rester sur son tapis de yoga pour enfants mais POURQUOI il s’est foutu en l’air si jeune ça nous regarde pas mais QUAND MÊME on aimerait bien savoir
Voyez-vous, la peur que nous éprouvons
pour la santé morale de nos enfants,
c’est comme se réveiller maltraité par dix-sept tracteurs
Un adolescent se jette dans la mort. Ce suicide est le point de départ de la pièce, dans laquelle différents êtres surgissent sous une forme humaine ou animale (on rencontre, entre autres, un renard, des vers et leurs larves) pour partager leurs inquiétudes. Avec une écriture sensible, drôle et incisive, Katja Brunner passe au scalpel l’attitude de la société face au suicide, au deuil, notre incapacité à faire face à la tristesse. Pourquoi nous contentons-nous de pleurer les gens lorsqu’ils meurent, plutôt que de rendre leur vie désirable de leur vivant ? C’est alors tout notre conditionnement social, allant du système éducatif à la société de consommation, qui passe sur la table de dissection. Un texte complexe et puissant, cynique et cathartique. La langue de Katja Brunner déplace les limites du théâtre et de l’interprétation, nous poussant dans nos derniers retranchements. Elle peut évoquer celle d’Elfriede Jelinek, grande écrivaine autrichienne. La jeune auteure est âgée de 22 ans lorsqu’elle est lauréate du Mühlheimer Dramatikerpreis, la plus importante distinction théâtrale d’Allemagne.
Anna Van Brée, connue pour s’attaquer à des textes exigeants tels que Sophocle, Goetz, Goethe, mettra en scène cette forme extrêmement contemporaine. Parce qu’elle est une fédératrice d’équipes. Parce qu’elle est flamande, mais de toutes les scènes romandes, elle est la passeuse qu’il nous faut pour ce texte d’outre-rösti ! Peut-être une nouvelle forme de tragi-comédie ?
L’Arche est l’agent théâtral du texte représenté.
www.arche-editeur.com
La traduction a été soutenue par la bourse Elmar-Tophoven, décernée par la Fondation Robert-Bosch et la Fondation DVA, en collaboration avec le Deutscher Übersetzerfonds ainsi que par Pro Helvetia – Fondation Suisse pour la Culture.
La création du spectacle a bénéficié d’une résidence aux Halles Saint-Géry à Bruxelles.