Lesbos. Grèce. Aujourd’hui, hier, demain. Une salle d’interrogatoire. L’interrogée : Sappho, la fameuse poétesse grecque, née vers 630 av JC. ressurgie depuis la mort. Confrontée à Phaon et Atthis qui attendent d’elle qu’elle complète ses poèmes, arrivés jusqu’à nous tronqués, fragmentés, perdus. Mais faire revenir les mortes oblige à se confronter à l’histoire. Raconter Lesbos, devenue l’île du tourisme lesbien. Raconter Lesbos, devenu lieu d’arrivée de voyageuses, réfugiées, migrantes. Raconter Lesbos, devenue une île sans eau. Phaon et Atthis sont peut-être deux gardes-frontières ou deux humanitaires. Ou peut-être qu’Atthis est simplement cette femme qui hante les poèmes de Sappho, tandis que Phaon serait cet amoureux inventé par les hommes pour cacher l’homosexualité de Sappho… Tout se brouille, se mêle sur l’île de Lesbos. Un voyage dans le temps dans lequel les années 1970, 2020 et 2070 dialoguent. Une figure, Sappho, à la fois poétesse célébrant l’amour au féminin, lesbienne et femme mûre, qui se déploie, transgressive et jouissive et nous interroge sur nos héritages au féminin et sur ce qu’on fait de nos vies.
// Vous savez ce qu’on dit ?
On dit que des siècles de femmes se sont aimées
À mon nom
Ont baisé
À mon nom
Ont écrit
À mon nom
Ont fait la révolution
À mon nom //
Sarah Jane Moloney dérange les genres, traverse les traumas et les légendes alpines comme les mythes îliens dans une langue poétique et engagée. Lauréate de la bourse d’écriture scénique Stück Labor 2018-19 et dramaturge de la saison_ensemble, elle imagine une fiction futuriste dans laquelle elle fait cohabiter et collapser différents moments de l’histoire de l’île de Lesbos. La langue, comme le reste, traverse les temporalités, comme une quête entre les mondes. Et c’est Anna Lemonaki, méditerranéenne, déjantée, et au don certain pour traduire les sentiments noirs et les blessures en un festival de couleurs, qui va s’emparer de cette fête. Elle est toute prête à semer la pagaille entre les disciplines et les représentations que nous avons du réel. Forcément la rencontre entre les esprits d’une Grecque vivant en Suisse et d’une Suisso-Irlandaise sur l’île de Lesbos ne peut qu’être une fête.