« CE QUI NOUS INTÉRESSE AVEC FEDERER, C’EST CES VERTUS »


ROGER FEDERER, CÔTÉ COURT, CÔTÉ JARDIN


ROGER FEDERER, DU RÉEL À LA FICTION


FEDERER SUR SCÈNE : LA BEAUTÉ DU GESTE


« FEDERER LE FANATISME ABSOLU ! »


MAILLEFER CRÉE UN HYMNE À FEDERER


FEDERER, HÉROS DE TRAGÉDIE


DENIS MAILLEFER, L'AMOUR AU FOND DU COURT


LIBRE COMME FEDERER


ODE AU PLUS ÉLÉGANT DES TENNISMANS


JEU, SET ET MATCH


« CE QUI NOUS INTÉRESSE AVEC FEDERER, C’EST CES VERTUS »
 

Jacques Musy, Le Matin Dimanche, 24 février 2013

 

Denis Maillefer et Bastien Semenzato composent une ode au tennisman. «In Love with Federer» est une création entièrement vouée au tennisman. A voir au Théâtre Le Poche à Genève.

 

«On ne l’a jamais vu jouer pour de vrai!» C’est dans ces termes que débute «In Love with Federer», pièce écrite par l’acteur et metteur en scène Denis Maillefer, en collaboration avec Bastien Semenzato. Durant une heure, sur un plateau dénué de décors hormis dix-sept écrans de télé tous diffusant, sans son, les grands moments de leur idole, tous deux vont détailler pourquoi et comment ils aiment Roger Federer. Tout en livrant des anecdotes réelles sur leur propre vie, à savoir où ils étaient – l’un à la maternité auprès de sa femme, l’autre en vacances au Portugal, par exemple – en train de suivre le tennisman lors de ses matches. Ces deux «sportifs de salon» nous emmènent peu à peu vers des sommets d’un lyrisme que seuls des fans absolus peuvent gravir. Et c’est drôle, d’une poésie à la fois naïve et distanciée. Et il est à parier que même ceux qui ne s’intéressent nullement au tennis et à son champion ne voient plus de la même façon ses prochains exploits. Nous avons demandé à Denis Maillefer, aussi chroniqueur dans notre journal, de nous conter le pourquoi et le comment de cet amour pour Federer.

 

Avec un sportif de haut niveau comme héros, vous inaugurez une nouvelle figure de théâtre?

On l’inscrit en fait dans une figure très ancienne, qui s’appelle l’ode ou le chant médiéval, dédié à un personnage qu’on admire, ici un sportif. Ce qui nous intéresse avec Federer, c’est ses vertus. Il a été écrit que ce sera la fin du tennis après lui, qu’il a une dimension cosmique. Il est quasi déifié et c’est aussi ce que l’on fait un peu dans ce spectacle.

 

Pourquoi Federer?

Qu’on l’aime ou pas, son palmarès, la dimension esthétique de son jeu, son aura, sa manière de jouer dans le silence, de ne pas être dans les codes du sport moderne, du genre arracher son maillot ou faire quelque chose pour se rendre intéressant, font qu’il est dans un « ailleurs » par rapport à tous les autres sportifs ayant existé. Il est juste là pour jouer.

 

Vous auriez écrit ce même texte pour des comédiennes ou, pour vous, le tennis demeure une histoire de mecs?

 

Non, bien sûr que non! A un moment j’ai pensé faire jouer mon rôle par une actrice, puis j’ai renoncé. Mais je pense que deux comédiennes auraient très bien pu le faire. D’ailleurs certaines parties du texte proviennent d’interviews de femmes, par exemple lorsqu’on dit qu’il marche sur des roses.

 

Vous aimez si démesurément Federer que c’en est touchant et comique. A se demander si vous ne vous moquez pas de ses fans?

Oh non, si on se moque, c’est de nous, objectivement on a conscience que c’est trop lorsqu’on fait notre longue diatribe sur combien on l’aime, par exemple.

 

Cet amour résisterait-il si vous appreniez que Federer s’est dopé?

Ce serait difficile, il y a une sorte de moralité dans ce qu’on en fait, une moralité un peu archaïque aussi, on le voit un peu comme un blanc chevalier et ce serait une grosse déception! Mais cela m’étonnerait vraiment qu’il se soit dopé.

 

Hormis une allusion à Nike, vous ne lui reprochez rien. Par amour, vous auriez pu l’agresser un peu plus, non?

 Bien sûr, on évoque au début le fric, la propreté, mais on est sur un autre terrain. Ce qui ne nous empêche pas d’être lucides. Ce serait un autre spectacle, plus un travail de journaliste ou de sociologue. Bien sûr, l’argent, tout ce bordel, c’est affreux.

 

Vous évoquez très peu sa vie privée, pourquoi?

D’entrée, c’est son jeu qui nous a intéressés. Sa vie privée ne nous regarde pas. Les gens se permettent des choses avec les stars, comme de dire de Mme Federer qu’elle est comme ci ou comme ça, qu’elle est trop moche, qu’il mérite mieux qu’elle, je m’en fous de tout ça. De plus cela ne me regarde pas.

 

Dans la salle, deux places sont «réservées» au nom de Roger et Mirka. Vont-ils venir?

Ce serait génial, mais on ne se fait pas trop d’illusions. On a essayé de les contacter, et maintenant on va pouvoir lui envoyer quelques photos, quelques articles et peut-être les intéresser à nous donner un petit signe de vie. On n’imagine pas à quel point il est surprotégé, suroccupé et très sollicité.

 

Qu’allez-vous devenir lorsque Federer cessera de jouer ?

Ce sera bizarre et triste, mais on va s’en remettre.

 

Pratiquez-vous le tennis?

Pas du tout. Non, on est vraiment des regardeurs!

 

Parce que vous faites un spectacle sur Federer, avez-vous constaté que les médias s’intéressent tout à coup davantage à votre travail?

C’est sûr! Mais on ne l’a pas fait pour ça, et je ne pensais pas que ce serait à ce point-là! Je trouve très intéressant si cela attire des gens qui ne vont pas au théâtre habituellement, me disant que cela leur donnera peut-être envie de découvrir d’autres spectacles.

 

Pour finir, si Federer venait à lire cette interview, qu’aimeriez-vous lui dire ici?

L’inviter à venir voir le spectacle, lui dire ce qu’on dit sur scène, qu’on aime son jeu, rien d’autre. 


 

ROGER FEDERER, CÔTÉ COURT, CÔTÉ JARDIN
 

Marie-Pierre Genecand, Le Temps, jeudi 21 février 2013

 

A Genève, un spectacle rend un hommage palpitant au champion. Denis Maillefer explique le projet.

 

L’étoffe du héros. Sa botte secrète. Son supplément de classe, son génie incontesté. Dans In Love with Federer, à voir au Théâtre Le Poche à Genève avant une tournée romande, Denis Maillefer et Bastien Semenzato ne se contentent pas de dire leur adoration pour le plus mythique des champions. Ils se racontent sa portée symbolique, sa dimension tragique. La solitude au moment de frapper la balle, les larmes de la défaite, la soif de perfection et de conquête. Ils parlent de la fin aussi, de son déclin… Et se regardent en son miroir, comme si l’écran télé dans lequel rayonne le roi Roger donnait des clés, soufflait de puissantes vérités…

In Love with Federer dépasse donc simplement le cri de la groupie. Ce n’est pas une surprise pour qui connaît Denis Maillefer et son écriture ramuzienne, proche du corps et du cœur, mais habile aussi comme un revers lifté. Tout de même, il fallait oser. Car le kitsch consensuel ou le refrain usé menacent lorsqu’on parle d’une idole aussi vénérée. D’ailleurs, que ‘est-ce qui a poussé ces deux hommes de théâtre à fouler le court ? Réponse avec Denis Maillefer, metteur en scène et codirecteur des Halles de Sierre. Avec ce spectacle raffiné, il réussit un coup droit décroisé que le maître n’aurait pas renié.

 

Denis Maillefer, pourquoi avoir choisi de dire en scène votre passion pour Reger Federer ?

C’est une idée qui nous titillait, Bastien et moi, depuis longtemps, car depuis longtemps, nous vivions à distance mais de concert, via des SMS, tous les matches de Federer. Il nous a fallu un déclic pour oser cette déclaration sur un plateau. Une sorte de légitimation morale et philosophique. Elle est arrivée avec le livre d’André Scala, Les Silences de Federer, un ouvrage passionnant qui, d’une part, dit que Federer a redonné au sport sa capacité de récit, et, d’autre part, que son jeu libéré de tout diktat sportif et économique offre une échappée à celui le regarde. Au final, nous n’avons conservé que des bribes de ce livre avec l’autorisation de son auteur, mais son principe, un regard personnel et lyrique sur Federer, nous a inspirés.

 

Dans le spectacle, vous dites n’avoir jamais vu Federer jouer « en vrai », uniquement à la télévision. Pourquoi de tels fans que vous n’avez pas cherché à la voir pour de bon ?

Au départ, pour des raisons de timing et de disponibilité. Ensuite, dès l’écriture du spectacle, parce que nous préférions rester sur le fantasme de Federer. Pour établir un rapport intime et privé, presque secret, avec lui, plutôt que vivre une célébration publique. D’ailleurs, dans cet esprit, nous n’avons quasiment rien gardé des nombreuses interviews que nous avons réalisées. Elles nous ont nourris, mais l’idée principale a consisté à chercher en nous ce que cette icône mettait en jeu, ce qu’il faisait résonner. D’où cette progression qui va du plus concret au plus poétique, du plus léger au plus angoissé.

 

En adorant celui que tout le monde adore, n’avez-vous pas craint le spectacle démagogique ?

Non. D’abord, parce que tout le monde n’aime pas Federer. Certains rejettent son côté lisse de gendre idéal, sa maison à Dubaï, ses phrases passe-partout, son sourire inamovible. D’autres, au contraire, se méfient de son génie. En Suisse, où on préfère le travail au talent, Federer qui a un diamant dans les mains est suspect.

 

Et pourtant, il a dû travailler aussi, sur son mental…

Oui, à 17 ans, il était colérique et cassait ses raquettes. Il a dû faire le ménage dans sa tête. Mais déjà là, lorsqu’il arrivait à donner son meilleur tennis, il était un extraterrestre. Pour revenir à la possible démagogie du spectacle, c’est sûr qu’on surfe un peu sur la célébrité de Federer, mais on déroute également le public lambda avec cette approche très personnelle du sport.

 

Profitez-vous de ce sujet populaire pour aller chercher un autre public ?

Oui, à Sierre, nous allons démarcher auprès des clubs de tennis. Et à Lausanne, des scolaires sont prévus avec des adolescents qui ne sont pas forcément au gymnase. On a également bénéficié d’une promo au TJ Sport de la RTS. C’est rigolo, cette frontière brouillée entre sport et théâtre. Et justifié car, dans ce spectacle, on a aussi mis tout le bonheur et l’élan de vie que nous donne Federer. Federer est une fête, on le dit et on le redit !

 

Maintenant reste à savoir si LA star va venir vous voir…

Suspens ! Nous avons envoyé une invitation à sa femme et à son agent. Aucune nouvelle pour l’instant. Nous referons un envoi avec les coupures de presse. Nous sommes même prêts à lui organiser une séance privée ! Ne serait-ce que pour qu’il découvre le dispositif scénique, qui montre sur 17 écrans ses 17 victoires en Grand Chelem. Je suis sûr que Federer ne s’est jamais vu jouer simultanément sur 17 écrans ! Peut-être pourrait-il acheter cette installation pour sa maison à Dubaï ? Je rêve de sa venue, mais si ça arrivait, je ne sais pas dans quel état on serait…


 

ROGER FEDERER, DU RÉEL À LA FICTION
 

Florian Sägesser, La Côte, mardi 19 février 2013

 

Star du tennis, le Bâlois inspire bien plus que le monde sportif. Au théâtre ou en littérature, le champion prend une dimension romanesque.

 

Roger Federer est partout. Le joueur est devenu une légende, un mythe, une icône; l’homme un modèle. Le sportif bâlois fascine, intrigue, influence, rassemble, émerveille. «Les grandes stars sont celles qui font des gestes, des choses qui vous sautent à l’œil à n’importe quel moment, même un simple mouvement dans leurs yeux», disait Andy Warhol. Même absent, Roger Federer reste présent. Une ombre qui plane, silencieuse. Lors de la dernière rencontre de Coupe Davis, Stanislas Wawrinka a passé la moitié de son temps devant les médias à répondre aux questions concernant Federer. Jusqu’à des interrogations d’ordre privé («Vous a-t-il envoyé des messages?»; «Que vous a-t-il écrit?»).

Le phénomène Federer monopolise l’attention, comme si le champion appartenait à tous. Le héros des courts est aussi devenu héros tout court. Source d’inspiration et d’hommage. Les spécialistes ont très vite planché sur le sujet, avec des ouvrages biographiques et techniques magnifiant son jeu.

 

Une échappée poétique

Le cinéma s’est intéressé au Suisse quand il gagnait pratiquement tout (Federer et Moi, de Robin Harsch en 2006). La littérature contemporaine s’est, elle, penchée sur le phénomène dès ses défaites plus fréquentes, en 2008, et cette phrase du «Maître» – habitué et habituant au succès –, après son élimination en demi-finale de l’Open d’Australie: «J’ai créé un monstre.»

L’aveu a nourri l’imaginaire des auteurs en tout genre. Aux confins de la fiction et du réel, l’écrivain Arno Bertina s’est glissé alors dans la peau d’un journaliste sportif en quête d’une interview de «Rogeur Fédérère» (Je suis une aventure). «C’est la question de la grâce qui m’intéresse chez lui. Il allie la perfection technique avec une créativité incroyable», confiait l’auteur français lors de la publication de l’ouvrage l’an passé.

L’odyssée imaginée par Arno Bertina, suivant le champion a travers le monde, de tournoi en tournoi, explore une problématique: comment rester en mouvement quand tout le monde ne voit plus qu’une icône sportive, figée telle une statue. La grâce, cette «magie», peut-elle quitter l’athlète lorsque celui-ci rencontre des échecs répétés?

Singulier, poétique, le jeu de Roger Federer révèle une échappée. Il s’affranchit des carcans, des standards de puissance, offre une variation. Il amène le jeu plus loin. «Il n’invente pas de coups ni de gestes, mais un certain rapport du geste au mouvement», avance le philosophe André Scala, dans son essai Silences de Federer.

Pourtant, la figure de «RF», sans relief et antithéâtral, ne semblait pas destinée aux planches ni à la littérature, qui préfèrent les personnages à fêlures; des anti-héros en quête de rédemption. C’est cependant bien la classe, l’aura, l’esthétisme, le «classicisme» du Bâlois qui séduisent le monde des arts. «Malgré ce côté lisse, il a cette abnégation. Etre au sommet possède ce côté vertigineux», relève Bastien Semenzato, acteur et co-scénariste de la pièce In Love with Federer, actuellement à Genève, avec son compère Denis Maillefer.

 

Expérience mystique

Dans leur création, les deux comédiens amateurs de sport ne «jouent» pas Federer. «Nous décrivons «notre» Roger et l’utilisons comme prétexte pour parler du beau geste, de sa nécessité, et bien sûr de nous.» Federer, reflet d’une époque et miroir des passions? Le spectacle se bâtit tel un chant, une ode dédiée au Bâlois. «Malgré la machine médiatique l’entourant, il continue à jouer au tennis pour la beauté du jeu. Il est classique, presque romantique dans sa façon d’aborder son sport», admire Bastien Semenzato.

Le Genevois n’a jamais vu un match de Federer en vrai. «Nous en avons eu l’occasion mais ne voulions pas le faire durant la mise sur pied de la pièce afin de garder cette notion de rêve et de fantasme.» Assister à une partie du «Maître» découle d’une expérience quasi mystique, comme le décrit l’écrivain américain David Foster Wallace dans son article Roger Federer, as a religious experience. «Ses matches ressemblent à des poésies, des œuvres d’art. Federer est là mais aussi ailleurs. Il y a quelque chose de tragique dans cette solitude d’être le meilleur», ajoute Bastien Semenzato. Si l’homme de théâtre a créé cette pièce avec Denis Maillefer, c’est également pour rencontrer Roger Federer. «Nous essayons d’attirer son attention via certains contacts, mais nous ne nous faisons pas beaucoup d’illusions.»

L’icône Federer, presque érigé en dieu-vivant, revêt une part d’inaccessible. Universel, l’athlète reste pourtant proche des gens par le souvenir commun. «Sur le court, on a l’impression de le comprendre. Il pleure et tombe souvent à genoux après ses victoires; il dégage une émotion très puissante qui nous parle, quelque chose de mystérieux et très personnel.»

 

 

«Le sport se veut une écriture de gestes»

PHILOSOPHIE «On a oublié que même les héros pleurent.» Les larmes de Roger Federer lors de ses victoires ou ses défaites en Grand Chelem, ses pleurs silencieux, traduisent son amour torrentiel du tennis. «Les grands combats mettent en jeu le jeu, et Federer emmène le jeu où le désir est cause de tout le reste», écrit André Scala, professeur de philosophie.

Dans son essai Silences de Federer, l’essayiste français amateur de tennis s’approprie le champion bâlois pour l’emmener sur un terrain philosophique. Il le présente à la fois comme héros – tel Achille dans la mythologie grecque – et historien; un joueur plasticien ayant fait le choix de l’esthétique face au tennis parlant de la modernité. «Il oppose une esthétique de la grâce et une esthétique de l’expressivité.» L’homme aux 17 titres du Grand Chelem, loin des ahanements et autres réactions intempestives de ses rivaux, offre donc une possibilité de jeu. «Le tennis est revenu silencieux», estime l’auteur de cet essai.

Sous la plume d’André Scala, le tennisman se mue en poète: «Roger Federer efface tout ce qui peut faire image dans son style, il sait qu’il ne survivra que dans les gestes futurs qu’il aura suscités, qu’il fait partie d’une his- toire, qu’il n’a rien d’immortel, que la vie d’un sportif, comme celle du héros, est brève. S’il est un héros c’est contre notre temps», développe encore le philosophe dans son ouvrage. En notant: «Le sport se veut une histoire sans écriture, une écriture sans mots, une écriture de gestes.»

 

 

André Agassi, l’anti-héros, aussi au théâtre

Roger Federer n’est pas le seul tennisman à investir le théâtre. Avant le Suisse, Andre Agassi a déjà chauffé les planches. Chevelure de rock-star (la fameuse perruque), tenue fluo et short en jeans, l’Américain est le sujet principal du spectacle André (au Casino de Rolle les 28 février et 1er mars). S’inspirant de Open, l’autobiographie d’Andre Agassi parue en 2009, la metteur en scène Marie Rémond  -qui tient également le rôle principal – a monté une pièce dédiée au «Kid de Las Vegas». Avec une dramaturgie et une envie: montrer l’envers du décor, les moments de doute, cet anti-héros avec ses fêlures. La pièce ne se revendique pas comme une adaptation de Open (les droits n’ayant pas été accordés), mais le livre du champion américain sert là d’outil de travail pour écrire les dialogues et entrer dans la peau d’un athlète que Marie Rémond décrit comme «fascinant».

 

 

 

 

 

 

PETITE SÉLECTIONLITTÉRATURE

 

Je suis une aventure

par Arno Bertina, Editions Verticales, 496 pages, 2012.

Ce peut-il que Federer ait perdu la grâce en perdant quelques matches? Un journaliste piste «Fédérère». Au fil des aventures, les deux compères s’en vont dérober la statue de cire de Federer, exposée au musée Tussauds. L’acte est symbolique: l’icône figée dans sa gloire doit disparaître pour laisser renaître le corps en mouvement.

 

Comment j’ai couché avec Roger Federer?

par Philippe Roi, LC Editions, 50 pages, 2012.

Dépressif, le narrateur de cette fiction au titre provocateur va à Roland-Garros, avec une amie. C’est la révélation. Il voit Roger Federer, son jeu élégant, et tombe sous le charme. L’athlète devient objet de désir, un fantasme, un remède à sa dépression. Ils se rencontreront dans une chambre d’hôtel.

 

Silences de Federer

par André Scala, Editions La Différence, 92 pages, 2012.

Essai philosophique consacré à la présence poétique de Roger Federer, qui emmène le tennis – par son talent, son style et sa façon de jouer – loin des impératifs actuels.

 

 

 

FILM

 

«Federer et Moi»

par Robin Harsch, 25 min, 2006.

Histoire entremêlée entre Roger Federer qui désire conquérir Roland-Garros; Charles, un historien amoureux qui veut conquérir la fille de ses rêves; et Robin, admirateurs des deux autres, qui veut faire un film 

 


 

FEDERER SUR SCÈNE : LA BEAUTÉ DU GESTE
 

Katia Berger, La Tribune de Genève, mercredi 20 février 2013

 

 

Ils sont fans, ils font du théâtre, ils dialoguent sur leur idole

 

Non, vous ne verrez pas Roger servir sur le plateau du Poche. Au mieux, vous le croiserez parmi le public, puisque les créateurs d’In Love With Federer ont réservé «une place à son nom (et une autre pour Madame) chaque soir, au cas où». Vous suivrez en revanche le héros des courts sur les dix-sept écrans d’ordinateur disposés sur la scène et qui diffusent en continu, pendant l’heure dix que dure le spectacle, les principaux matches de sa carrière.

Ceux dont vous admirerez le geste sur scène sont deux supporters de longue date de l’athlète suisse: Denis Maillefer, metteur en scène et directeur du Théâtre des Halles, à Sierre, et Bastien Semenzato, jeune et talentueux comédien issu de la Manufacture lausannoise. Ensemble, ils ont écrit leur «ode», ensemble ils l’interprètent. Et signent un spectacle à la démarche profondément originale.

 

Match amical

Originale parce qu’avant tout complice. Ni narratif ni théorique, encore moins journalistique, leur dialogue tâtonne en cherchant à comprendre: l’homme Federer, l’artiste Federer, la star Federer, le jeu Federer. Sous un grand panneau affichant des scores, Maillefer et Semenzato sondent également leur propre fanatisme, l’impact du sport sur les masses, les limites du corps, la valeur de l’instant («La balle touche la raquette pendant cinq centièmes de seconde: une vie qui se résume à cela!»). Ils scrutent les larmes de la victoire, celles du spectateur aussi. Et l’amour: Federer, «on l’aime comme les fleurs, comme les cervelas, comme la position du missionnaire... On l’aime comme un ouragan!»

En toute connivence, les deux interprètes accumulent par listes successives les souvenirs personnels ou les prouesses «de celui qui parle au vent». Leur élan commun ne méprise ni la midinette ni le philosophe qui sommeillent en eux. Leurs références piochent dans la chanson de variété comme dans la poésie de René Char. Un coup droit en forme d’analyse, une rêverie en guise de revers.

 

La tripe et la cervelle

Et c’est dans cette écoute attentive, partagée d’une passion à la fois populaire et raffinée que réside l’intelligence du projet. Car si le texte d’In Love With Federer apparaît comme éminemment travaillé, il est aussi d’une irrésistible drôlerie. Justement du fait qu’il conjugue si sensiblement la tripe et la cervelle. Le corps et l’âme, qui se livrent ici un match amical «de toute beauté» – comme on lit dans les colonnes sportives.

Autant que l’humour, l’émotion occupe le terrain. Culminant en fin de pièce, quand les comédiens évoquent le déclin de leur champion et leur propre finitude. «Le jour où il dira: «C’est fini», je saurai que je dois mourir», diront-ils tandis que se réconcilieront dans un lob ultime la matière et l’esprit.

Les parallèles entre sport et théâtre, nos deux comédiens ne sont pas les premiers à les tracer. Athlètes et héros tragiques ont été maintes fois rapprochés. Au nombre des exégètes s’y étant risqués, il en est un que vous pourriez croiser, à défaut de Roger, au théâtre en Vieille-Ville. «Le tennis est un sport où on renvoie la balle, où on ne cherche pas à la garder pour soi», a déclaré un jour Jean-Luc Godard, cette autre icône helvétique qui ne dédaignerait probablement pas l’échange Maillefer-Semenzato.


 

« FEDERER LE FANATISME ABSOLU ! »
 

Fred Valet, Le Matin, samedi 16 février 2013

 

Le metteur en scène Denis Maillefer s’offre son 1er grand rôle dans In Love with Federer, une ode personnelle du champion. Il nous a renvoyé la balle.

 

J’aime Federer et je vous emmerde. Le crier haut et fort. Et sur scène, en l’occurrence, pour Denis Maillefer. Le metteur en scène lausannois sait qu’en glissant le patronyme d’un héros national dans le titre de sa nouvelle création, il monte au filet, la raquette bien en vue. In Love with Federer. Diable, ça en jette ! Oui, mais sous les atours aguicheurs bouillonne une véritable déclaration d’amour, torché le cœur droit. Le sien et celui de son ami comédien Bastien Semenzato, avec qui il a imaginé une petite folie. Une autofiction cocasse, poétique et d’une franchise à ce point exaltée qu’ils ont logiquement décider de l’incarner.

De l’assumer, même. Car, après vingt-cinq ans de mise en scène pure, et la réussite méritée qui lui colle au train, l’homme de théâtre de 48 ans s’offre enfin son premier grand rôle. Et le trac l’attaque. Pire, depuis quelques jours, la pression se répand dans les artères de ce passionné de Tchekhov (La Ciseraie, qu’il a monté trois fois). Il le sent, un autre public que le sien tend l’oreille. « C’est une petite pièce pourtant. Une envie très simple qui n’a pas nécessité cinquante figurants et 400 pages de texte. D’autant que ce projet est parti d’une boutade. » Reste que l’autofiction a toujours été prépondérante dans le travail de celui qui a fondé, en 1987, le Théâtre en Flammes avec Massimo Furlan.

 

Un génie introverti

In Love with Federer, une ode volontaire, avec cette monomanie naïve que demande l’exercice. « Une ode c’est forcément too much. On a fait le choix de se dévoiler amoureux tout en restant lucide », raconte-t-il. Si Federer a usé beaucoup d’encre et de bobines chez les intellectuels, c’est qu’il est l’un des rares champions à distribuer du frisson à l’aveugle. Sur l’épiderme du passionné de tennis, jusque dans le jogging moite de l’amateur téléphage. Mais surtout parce qu’il incarne le génie introverti, la puissance muette et la gagne maîtrisée. Une exception silencieuse lâchée sur les courts infestés de gueulards et de grimaciers. « Ce Type est fait pour être raconté. Il a décidé un jour que, plus que d’autres joueurs, sa vie se résumait à un rectangle orange. Plus rien n’existe lorsqu’il empoigne sa raquette. Et le fait qu’il ne s’éparpille pas permet de beaucoup fantasmer. Notre travail commence ici. Et on s’est beaucoup documentés, notamment avec le bouquin du philosophe André Scala (Silences de Federer). Nous citons même quelques passages sur scène. Il nous fallait rencontrer d’autres fans aussi, pour savoir si nous visions juste. Et je peux vous dire que l’on n’est pas les pires ! (Rire.) Une femme nous racontait qu’elle avait le besoin d’en parler régulièrement à sa psy tellement Federer tenait une place folle dans sa vie. » S’il n’a pas rencontré Federer, Denis pense qu’il doit être au courant du spectacle. « On aurait adoré, évidemment ! Masi il se méfie, à juste titre, de tout ce qui se crée autour de son nom. »

Sa costumière déchire soudain la discussion d’un « salut ! » énergique. Dans son sac, un sabre laser estampillé Star Wars et deux paires de chaussettes noires. Noires ? « Nous sommes en costard sur scène. On n’allait pas s’afficher en cuissettes ! » Ce qui n’empêchera pas les deus artistes de se renvoyer la balle. Car, mieux que personne, celui qui fait lever le rideau aussi souvent qu’il pédale sur son vélo a toujours été convaincu du lien étroit qu’entretiennent le sport et la scène : la performance. « J’irais même plus loin. Les artistes ont toujours été un peu jaloux de la grande part d’inconnu présent dans le sport. Le suspens est tout le temps présent. Le sport est imbattable dans la dramaturgie. »

Et s’il se glisse volontiers dans la peau du fan, c’est aussi pour dire que tout le monde est intéressant, « donc nous ». Une nouvelle vocation de comédien ? « Non, c’était exceptionnel. Chacun son travail. » Le sien, il l’abat avec l’énergie du passionné et le soutient infaillible des distributeurs de subventions. « Avec l’âge, je réalise la chance que j’ai d’être payé pour ce que je fais. Avant, jeune et frondeur, je pouvais trouver ça normal. »

Des rêves il en a réalisé plus d’un. Comme celui de diriger son propre lieu, le superbe Théâtre des Halles à Sierre, avec Alexandre Doublet. « Sinon, l’opéra me manque, car j’en ai fait un peu à l’époque. Quel plaisir de mener quelque chose à bien avec cette musique ! Et je crois que je n’étais pas trop mauvais », se projette Maillefer, la pupille rieuse. Et on le croit dur comme fer. 


 

MAILLEFER CRÉE UN HYMNE À FEDERER
 

Céline Rochat, 24 Heures, vendredi 15 février 2013

 

Le théâtre de Poche, à Genève, accueille In Love with Federer, la nouvelle pièce du metteur en scène lausannois

 

Comme une boutade, tout est parti d’une histoire de fans, entre le metteur en scène Denis Maillefer et son ancien élève de la Manufacture, Bastien Semenzato. « Nous avons toujours échangé de vive voix et par SMS au sujet des matches de Roger Federer, commente Denis Maillefer. Depuis neuf ans, on plaisantait sur le fait qu’on devrait en faire un spectacle. L’an passé, je me suis dit que c’était le moment. » Le résultat est à voir à Genève, puis à Paris, à Sierre et à Lausanne.

Pour créer In Love with Federer, les deux comédiens ont analysé le regard « d’admirateur énamouré » qu’ils portent sur le plus grand tennisman suisse. « C’est une ode au premier degré, une déclaration. » Sur scène, ils ne tenteront pas d’imiter services et revers, mais utiliseront la vidéo pour faire monter leur idole virtuellement sur les planches. Ils ne se sont pas préoccupés du côté people du personnage, ni de ses choix, comme sa vie à Dubaï. « Ça ne nous intéressait pas. »

Si Bastien Semenzato et Denis Maillefer admirent tellement le sportif, qu’ils n’ont jamais rencontré, c’est pour son élégance et la beauté de son geste ». Et Denis Maillefer de s’émerveiller : « C’est un pur esthète. C’est incroyable de voir à quel point il s’est consacré entièrement é son art. Il y met un soin sublime. Roger Federer est un exemple unique, seul capable de lier tant de beauté et un tel palmarès. »

Denis Maillefer se plaît à regarder l’élégance des mouvements du Bâlois. « Sur les forums, ses détracteurs le traitent de danseuse. Mais dans ce monde très masculin et puissant, il oppose le délié, la finesse et l’harmonie. » Denis Maillefer regrette seulement que la tournée d’In Love with Federer s’arrête à l’Arsenic durant Roland Garros. Un problème vite balayé : « On mettra les matc


 

FEDERER, HÉROS DE TRAGÉDIE
 

Julien Burri, L’Hebdo, 14 février 2013

 

Le metteur en scène vaudois Denis Maillefer raconte sur scène sa fascination pour Roger Federer. Avec l’acteur Bastien Semenzato, il a imaginé le spectacle In Love with Federer pour rendre hommage à  l’ex-numéro un du tennis mondial.

 

Sur scène, il n’est question que de lui : Federer. Aucune ironie dans cet éloge signé Denis Maillefer et Bastien Semenzato, mais une subtile autodérision, notamment lorsque les acteurs lisent les SMS qu’ils ont échangé le 8 juillet 2012, pendant la finale de Wimbledon, alors que Federer battait Murray : « Je souffre, je bouge plus, je suis tétanisé. » Le metteur en scène vaudois Denis Maillefer, codirecteur du Théâtre des Halles à Sierre, remarqué pour avoir mis trois fois en scène La Ciseraie de Tchekov, ou pour avoir créé un spectacle joué en appartement – Ariane dans son bain, lecture de Belle du Seigneur par une actrice plongée dans une baignoire, au domicile même du spectateur – ne ménage pas son admiration pour l’ex-numéro un mondial. « C’est un cas unique, le tennis s’arrêtera peut-être avec lui. » Mais pas question pour cet ancien assistant de Patrice Chéreau de jouer le rôle de Federer, ou de mimer une partie de tennis avec son acolyte Bastien Semenzato. L’homme est rarement sous les feux de la rampe, ou alors « pour dépanner », dans des spectacles basés sur des témoignages (réels et fictifs) comme Je vous ai apporté un disque ou La première fois. Sur la scène du Poche, à Genève, en pleine répétition, il glisse, « plus jamais je ne serais acteur ! » suscitant les rires de son équipe. D’une savante fragilité, il vient témoigner de son amour de Federer. Rien de sexuel, nous assure-t-il. Oui mais on n’entend pas tous les jours de telles déclarations : « On l’aime comme les nuits blanches de la Baltique. On l’aime de toutes les manières qui existent d’aimer. On l’aime parce qu’il nous fait vivre. On l’aime parce qu’il nous empêche de vivre. » Il ne sera pas question, dans ce spectacle, de ce qui fâche (« Dubaï, Nike, un veston blanc cassé, des mots convenus parfois, l’argent, la propreté »). Même si l’humour n’est jamais loin dans le texte de Mailefer : « On l’aime comme les choses qu’on a parfois honte d’aimer. Les cervelas, les chansons de Lana del Rey, les frites du McDo, les séries télé danoises, la position du missionnaire dans un lit, le chocolat de la Migros, la mayonnaise Prix Garantie et les cornichons au vinaigre. » Toujours ces allers-retours entre émotions et petits détails quotidiens, entre l’amphithéâtre classique et la petite cuisine de l’intime. « Le titre était une boutade, mais on l’a gardé. Aucune ironie là-dedans. Je suis fatigué de l’ironie au théâtre. Je ne sais pas faire cela. » Maillefer est un sentimental. A noter que son amie est insensible au charme du tennisman bâlois. « Sa maîtrise lui fait peur. » Comme si tant de retenue cachait d’angoissants abîmes…

 

Du style avant toute chose.

In Love with Federer se nourrit de l’essai philosophique Silences de Federer, d’André Scala (Ed. de la Différence) – mais curieusement pas du roman Comment j’ai couché avec Roger Federer, de Philippe Roi (Christophe Luquin Editeur), que Maillefer n’a pas lu. S’y ajoute une importante enquête de terrain. Les acteurs concepteurs ont rencontré des fans, surtout des femmes. Mais aussi une numérologue qui leur a expliqué que Roger était l’incarnation d’un lion, et que Mirka était la femme parfaite pour lui. C’est écrit, paraît-il, dans les étoiles. Les deux groupies, sous couvert d’anecdotes, remontent rapidement à la source de leur fascination. Taper dans une balle avec une raquette, c’est peut-être la chose la plus banale du monde, mais lorsqu’on le fait avec une telle précision, un tel degré de perfection, cela ramène à la geste chevaleresque, aux héros de Homère. En 2013, Achille s’appelle Roger. La balle, c’est le destin qui fond sur vous. « Regarder Federer jouer nous pousse, par rebond, à nous interroger sur notre intimité, analyse Denis Maillefer. A nous demander : est-ce que je vais jusqu’au bout de ce que je fais ? Qu’est-ce que je fais de mon corps ? » La partie est une mise en abyme de la vie. « Dans l’échange, sur le court, il faut s’adapter en permanence à l’autre, en le respectant, mais sans se trahir. Comme dans l’amour. » Enfin, Federer, c’est une leçon de style. Si l’on revient à Deleuze, dans le tennis, il y aurait les inventeurs de style, exceptionnels (Borg McEnroe) et les suiveurs « insipides » (Guillermo Vilas). Federer fait partie de la première catégorie. « A chaque coup, il surprend, poursuit Denis Maillefer. Et en même temps, son jeu est classique. On pourrait le qualifier d’académicien créateur. Il en est conscient. Il a travaillé chaque coup pour qu’il soit beau. » Comme l’acteur qui répète jusqu’au naturel. « Pour arriver à la spontanéité, il faut un énorme travail. Répéter 8000 fois le même coup droit pour parvenir à être instinctif. » Le sportif est avant tout un corps, dans une société qui valorise de moins en moins le travail du corps. Pire, l’évacue. Avec un Federer à la grâce de danseur, le corps revient au centre. « Ce serait cool de le rencontrer, imagine le metteur en scène, pour voir l’énergie qui se dégage de lui. Cela se fera peut-être un jour, mails y a une muraille vertigineuse autour de lui, son entourage, qui le protège. » Mais pourquoi faire d’un homme apparemment sans histoire un héros ? « Son drame, c’est qu’il n’en a pas. Il est lisse. Tout le monde aimerait qu’il soit scandaleux. Mais rien, il se consacre entièrement au tennis. » Alors quoi ? Y aurait-il une faille cachée ? Une blessure secrète ? Pourquoi ce « héros » qui a battu tant de records, amassé des sommes folles, continue-t-il de se mettre en jeu ? De taper la balle ? « Simplement parce qu’il aime ça. Le tennis lui donne des émotions qu’il ne peut pas avoir ailleurs. »

 

Une page blanche.

En marchant dans les rues genevoises pour rejoindre le théâtre du Poche, partout, Federer. Sur des affiches format mondial, le champion fait un clin d’œil pour vanter une banque suisse. On se demande ce qu’ils lui trouvent, à ce gentil garçon. Appliqué, travailleur, parfait. Tellement suisse. Si on se contente de son vernis médiatique, sans le regarder évoluer, que dis-je, « danser » sur le court, il paraît creux. S’il sonnait à la porte, c’est sûr, on le prierait de dormir dans la baignoire. Sa puissance narrative viendrait-elle de sa retenue ? Tout a débuté un jour où le jeune Roger, fragile, friable, nerveux et colérique, a commencé à réfléchir. « Un jour, il est rentré chez lui et il a rangé sa chambre », explique Bastien Semenzato. Depuis, il ne laisse plus ses états d’âme contaminer le tennis. Son apparente vacuité est le fruit d’un travail, d’un choix. A la fin, cette hagiographie parle surtout des larmes du spectateur, qui peut vivre à travers le champion. Justement parce qu’il est une page blanche, sur laquelle chacun peut s’écrire. Ce spectacle parle de notre intimité, plutôt que de la sienne, dont nous ne savons rien. Comment nous rattrapons, ou non, les balles que le destin nous envoie. Le héros de notre temps ? Denis Maillefer réfléchit : « En tout cas, il est bien plus intéressant que Lady Gaga. »

 


 

DENIS MAILLEFER, L'AMOUR AU FOND DU COURT
 

Cécile Dalla Torre, Le Phare, février-avril 2013

 

 

Le metteur en scène vaudois monte In Love with Federer, ode à un artiste « de la balle », qui consume sur le terrain de jeu toute la puissance de l’instant. Explications, en amont d’une tournée romande entrecoupée d’un passage printanier à Paris.

 

On cherche, on ne trouve pas. Qui en Helvétie pourrait incarner mieux que Denis Maillefer l’essence même d’un théâtre romand ? Lui qui voulait « brûler les planches » avec une bande de copains, dont le scénographe Massimo Furlan, lançant son Théâtre en Flammes il y a plus de vingt ans. Au rythme dépassant une mise en scène par an, forcément, on imagine l’énergie déployée. Cadence folle ?

La question du temps, précisément, titille l’artiste. « À l’époque, on pouvait s’improviser des séances de travail du jour au lendemain. Maintenant, on cale des rendez-vous, on se fait des bidules par courriel. Le calendrier s’appréhende autrement. » En filigrane, sa langoureuse Ciseraie, remontée en 2012, évoquait le lien au présent, au futur, à l’immédiateté. Et la jouissance dans tous les sens du terme, par la voix des personnages anachroniques, très égoïstes et autocentrés de Tchekhov, résume Denis Maillefer d’une pièce à laquelle il ne se lasse pas de s’atteler – et dont on a pas manqué de se délecter -, injectant une esthétique subtilement contemporaine dans une mise en scène à son sens pourtant assez traditionnelle. « Je suis un peu classique en Suisse : je ne déconstruis pas le texte ni les écritures de plateau, ce n’est pas ma culture. »

Le rapport au temps est l’une des questions centrales de nos sociétés contemporaines, avance celui qui n’a pas encore trouvé les précieuses minutes pour lire un récent article du Monde sur le sujet. « On se plaint tous d’être surbookés, en termes fatalistes, révolutionnaires, scandalisés. Ou on subit son sort dans une profonde inconscience. L’e-mail finit par être considéré comme un obstacle. »

 

Absence de direct

 

Entre la Ciseraie et In Love with Federer, en phase de création avant de tourner à Genève, Paris, Sierre et Lausanne, il existe bel et bien des correspondances secrètes. L’instant présent évacué par la communication via sms et e-mail pose la question de l’absence de direct. D’où une imbrication patente entre le tennis et l’art dramatique, dont se saisit le metteur en scène qui aurait tout aussi pu se frotter au journalisme – sportif, on s’en doutait -, s’il n’avait jeté son dévolu, très jeune, sur l’univers des planches.

Logique donc de mettre les deux disciples en parallèle ? Alors que le théâtre propose un direct, le sport est aussi la dernière activité qui se vit instantanément. La presse ne raconte plus les matchs que l’on peut suivre de visu, déplore Maillefer, qui dévorait tout ce qui avait trait au « sport comme manière d’être un récit sur le monde ».

Le récit, au sens premier, fonde la démarche du metteur en scène, qu’il émane d’un texte théâtral ou pas : « Une assez belle forme de théâtre archaïque » à ses yeux. Les romans l’ont souvent inspiré, y compris des formes novatrices rapiéçant des poèmes à la suite. À l’image de Seule la mer de l’israélien Amos Oz (qu’il montera en 2014), où des gens se racontent, et qui vient de lui faire gagner un concours de projets suisses romands (Label +).

En amoureux de la langue, Maillefer fait feu de tout bois littéraire. Avec l’art et la manière peut-être d’un Joël Pommerat, dont il apprécie particulièrement le travail. Sa Bérénice, créée en 2000 à Lausanne, il pourrait sans forfanterie excessive la ranger dans la même famille artistique. Sous forme d’une autofiction opérant sur la langue, In Love with Federer racontera aussi un intime, celui de Denis Maillefer et de Sébastien Semenzato, ses deux protagonistes sur scène, tout en louant poétiquement les talents du tennisman.

 

S’affranchir du planning

 

Au fait Denis Maillefer, pratiquez-vous le tennis ? « Non, et c’est tellement plus difficile ! » Un sport qui nécessite en plus de prendre rendez-vous, auquel il préfère le badminton, en tandem avec son fils. Sans omettre de mentionner que le tennis professionnel, lui, s’affranchit paradoxalement du planning. « Les finales et les premiers matchs sont fixés, mais on ne sait pas combien de temps ça dure. On ne peut donc jamais rien prévoir. »

Après ce rendez-vous lausannois au Café du Simplon où Denis Maillefer nous a livré ses intentions – jour de finale des Masters qu’il entend bien suivre après quelques coups de fil pour discuter de la tactique à aborder ! -, il enfourchera son vélo, fidèle compagnon de route, qu’il emprunte, lui, à loisir. Il embarque souvent l’engin dans le train et rallie ainsi en quelques minutes, au sortir de la gare de Sierre, le Théâtres des Halles, qu’il codirige désormais avec son jeune acolyte Alexandre Doublet. Le plus expérimenté du duo de metteurs en scène, pas encore quinqua, mais néanmoins clairvoyant, a pris la direction bicéphale d’une salle, en sachant trouver des parades : le mi-temps. De quoi poursuivre sa ligne de mire artistique tout en menant une passionnante aventure là où la curiosité d’un public valaisan ne demande qu’à être attisée.

 

« Le plein m’effraie »


Pour un directeur de compagnie soutenu par la ville de Lausanne, diriger un théâtre est une expérience stabilisante et tout aussi déstabilisante, en ce sens que la nouveauté et la charge de travail en cause riment avec un changement de rythme professionnel. « Le vide ne m’a jamais vraiment stressé, c’est plutôt le plein qui m’effraie. »

Faute de temps, ce n’est pas lui qui aidera Aline Papin à camoufler sa nudité par la mousse sensuelle d’une vraie baignoire, aux contours érotiques dessinés par Albert Cohen dans un légendaire monologue tiré de Belle du Seigneur. À la veille d’une 151e représentation d’Ariane dans son bain – dans un contexte genevois inédit, à la demande de la maison de retraite du Petit-Lancy -, Maillefer se réjouit de cette « mission citoyenne » jouant le jeu d’un théâtre populaire.

Partie d’une plaisanterie avec l’une de ses comédiennes fétiches, la pièce créée en France pour la scène nationale d’Aubusson, avec qui il collabore régulièrement, « fait flasher la poignée de chanceux qui l’ont vue », - dont le public parisien du Festival Extra Ball au CCS-, à savoir six à huit spectateurs par représentation en moyenne. Taille des salles de bain  des particuliers qui l’accueillent chez eux oblige.

 

Définitivement romantique

 

Pour conjurer l’abondance, Denis Maillfer trouve aussi d’ingénieux subterfuges. « En ce moment, j’aime travailler dans les trains. » Là, il puise toute sa concentration, à l’abri des courriels, dépourvu de smartphone. Il y est nulle part, voyant sa journée bouger même quand il estime n’en avoir rien tiré. « Le problème, c’est qu’en Suisse, les distances ne sont pas assez grandes ! L’idéal, c’est de monter dans le train pour Saint-Gall, soit quatre heures de trajet ! »

Le chemin de fer a ce goût surannée et définitivement romantique, tel le metteur en scène qui s’est amouraché de la présence poétique de Federer et de la beauté de son geste. Remballons notre hâte de nous émouvoir du fruit de ses cogitations nomades, qu’il espère tout sauf « gnangnan » et un brin « innovant ». Quant à « l’artiste » qui manie la balle, qui sait s’il se laissera prendre dans le filet de sentiments amoureusement tissé par ses groupies ? Quoi qu’il en soit, Denis Maillefer lui voue un amour inconditionnel. Et à l’entendre, le mythe n’est pas près de s’éteindre.

 

 

Maillefer versus Federer

«Je l’appelle toujours Federer, jamais Roger comme si je le connaissais » confie Denis Maillefer. Une muraille entoure le Bâlois, qu’il n’a jamais rencontré, ni même vu jouer en live durant ses dernières années où sa passion pour l’athlète est pourtant allée crescendo. Et si Federer n’avait pas été suisse ? Admirant quelques skieurs helvétiques, Maillefer avoue s’être toujours plutôt intéressé au style qu’à la nation, sans pour autant nier le plaisir de voir des compatriotes remporter une victoire. « Le plus fascinant, c’est son unicité, qui répond à ce que l’on peut attendre de la Suisse, très bien faite et gestes, ce qui est nettement moins suisse ! » Et d’évoquer cette phrase qu’il aime, tirée d’un article du Temps lorsque le tennisman a gagné Roland-Garros : « Et peu à peu, nous avons aimé les têtes qui dépassent. »

 


 

LIBRE COMME FEDERER
 

Marie-Pierre Genecand, Le Temps, du samedi 9 au vendredi 22 février 2013

 

 

Au Poche, Denis Maillefer et Bastien Semenzato interrogent leur passion pour le champion

 

En marge d'une production classique où il crée des textes d'auteurs, Denis Maillefer aime solliciter la part biographique des acteurs. Dans Je vous ai apporté un disque, imaginé en 2005 et beaucoup repris depuis, Pierre-Ysaïe Duc, Madeleine Piguet ou Gilles Tschudi évoquaient un aspect de leur corps qui les fâchait ou les charmait. Et ce coin de voile levé sur une part intime créait un moment de théâtre insolite, désarmant.

In love with Federer relève de la même démarche. Fans ou plutôt fanatiques de Roger Federer, Denis Maillefer et l'acteur Bastien Semenzato interrogent ce culte en cherchant à comprendre ce qui fait la singularité de leur athlète préféré. Après avoir lu des textes et analysé le jeu du champion, ils observent aujourd'hui que, loin d'être menotté par les impératifs sportifs et commerciaux, Federer respire la liberté de jouer. D'où, sans doute, son aura glamour et poétique quand d'autres ont des profils de bûcherons besogneux. Tout le monde aime Federer? Oui, mais peu savent vraiment pourquoi.


 

ODE AU PLUS ÉLÉGANT DES TENNISMANS
 

Tuana Gökçim Toksöz, Nouvelles, février 2013

 

Denis Maillefer et Bastien Semenzato idolâtrent Roger Federer au point de lui dédier une œuvre théâtrale.

 

 

Que le tennisman helvétique ne soit plus le numéro un mondial n’a en rien ébranlé le fanatisme de Denis Maillefer et Bastien Semenzato. C’est sur la scène du Théâtre Le Poche qu’ils exposeront, commenteront, dissèqueront le pourquoi de cette passion vouée a un « inconnu célébrissime qui tient une raquette dans la main ». Entretien avec Denis Maillefer.

 

 

Comment vous êtes-vous retrouvé, avec Bastien Semenzato, à mettre en scène ce projet insolite ?

Bastien était mon étudiant à la Manufacture de Lausanne. On échangeait pas mal sur le sport en général et le tennis de Federer en particulier. On se disait, pour rire, qu’un jour on ferait un spectacle sur cette passion commune. Cette idée était dans l’air depuis un moment.

 

Vous regardiez les tournois ensemble ?

Nos échanges étaient plutôt épistolaires et se faisaient de façon contemporaine, c’est-à-dire par sms. On en parlait aussi quand on se voyait ou par téléphone durant les matchs.

 

Pourquoi Roger Federer ?

Déjà pour des raisons purement sentimentales : parce qu’on l’aime bien ! D’une manière peut-être plus intéressante, je pense que Federer est un cas unique dans l’histoire du sport. Quelqu’un qui rassemble autant de qualités esthétiques dans son jeu, qui détient un tel palmarès, une telle longévité et qui transcende autant de commentateurs ne peut qu’être exceptionnel.

 

Excepté son palmarès vertigineux, en quoi ce joueur est-il particulier ?

La beauté du geste de Federer est absolument singulier ! L’harmonie et l’élégance de son jeu nous a frappé d’emblée. Si on prend n’importe laquelle de ses photos, on a toujours l’impression que des spécialistes en biomécanique lui ont placé les jambes et les bras afin qu’ils fassent des angles parfaits, des équilibres parfaits, des centres de gravité parfaits…

 

D’après vous, son tennis aurait quelque chose de poétique ?

Je le crois vraiment ! Aujourd’hui, il perd des matchs parc qu’en face il y a parfois un peu plus de puissance, parfois plus d’énergie ou de constance. Mais quand il est au sommet de son jeu, il reste encore le plus fort et précisément avec un tennis fait de contretemps, de contrecoups et de changements de rythmes.

 

Regarder Federer jouer a quel effet sur vous ?

Ça revient à demander, pourquoi on regarde de l’art ? Pourquoi on regarde la beauté ? Federer nous rappelle qu’on a tous un corps, une chose pas évidente tous les jours. Il rappelle aussi qu’on est mortel. Le voir, ça nous rempli d’un sentiment très difficile à exprimer.

 

Le suiviez-vous lors de ses matchs en déplacement ?

La chose paradoxale et absurde est qu’on ne l’a jamais vu jouer en direct. On en parle d’ailleurs dans le spectacle à travers une citation de David Foster Wallace : un écrivain américain qui avait écrit sur le tennis.

 

Pourtant cette forte passion laisse penser que vous avez pu approcher le joueur…

On a essayé en envoyant des mails à son agent, à sa femme, aux journalistes, mais il y a un mur autour de lui. En même temps cette distance permet de le fantasmer encore plus. On ne parle évidemment pas d’un fantasme sexuel !

 

Peut-on dire de Federer qu’il est votre muse ?

(Rires) On pourrait le dire… C’est drôle que vous utilisiez un terme féminin pour le distinguer. Avec Bastien, on aime justement cette féminité de Federer. D’ailleurs sur les forums des sites sportifs, ses détracteurs le surnomment la danseuse.


 

JEU, SET ET MATCH
 

Laurent Darbellay, Scènes Magazine, février 2013

 

Quelques semaines après l’Open d’Australie, dont on espère qu’il sera un des grands protagonistes, Roger Federer sera à l’honneur au Théâtre de Poche, dans une pièce qualifiée par son créateur, Denis Maillefer, de «théâtre héroïco-sportif».

 

Le tennis a déjà été à plusieurs reprises le sujet d’œuvres d’art ou de réflexions esthético-philosophiques. Au cinéma, William Klein a fait des coulisses et des courts de Roland Garros le cœur d’un de ses meilleurs documentaires, The French, tandis qu’Alfred Hitchcock exploite le suspens inhérent à ce sport en plaçant au cœur de Strangers on a Train une partie à Forest Hills que le héros, Farley Granger, doit absolument remporter le plus vite possible. Woody Allen choisit quant à lui de combiner dans Match Point tennis et lutte des classes, et Wes Anderson rend hommage dans La Famille Tenenbaum à John Mac Enroe, à Bjorn Borg et à l’esthétique tennistique de la fin des années 70. Plus près de nous, le Genevois Robin Harsch s’est intéressé à Roger Federer et à son aura tennistique et humaine dans son moyen métrage Federer et moi.

 

C’est également à Roger Federer que Denis Maillefer (directeur du Théâtre En Flammes, codirecteur du Théâtre des Halles à Sierre et enseignant à l’HETSR) a choisi de consacrer cet hiver un spectacle, en collaboration avec Bastien Semenzato. Tous deux habitués du Théâtre de Poche, Maillefer et Semenzato partagent également depuis déjà longtemps une fascination pour Federer. Rien d’étonnant, donc à ce qu’ils décident de mettre en mots et en scène cette fascination, et en se concentrant non pas tant sur la célébrité et le palmarès de Federer que sur l’élégance de son jeu, la légèreté de ses déplacements, la grâce de ses frappes, ainsi que la manière par laquelle il nous touche, sa «présence poétique».

 

Rencontre avec l’équipe de double Maillefer- Semenzato :

 

Comment en êtes-vous arrivés à envisager un spectacle sur Roger Federer ?

 

C'est une envie que nous avions depuis un certain temps avec Bastien Semenzato. C'était comme une forme de "Moscou pour les trois soeurs" (on en parle beaucoup et on ne le fait jamais), et puis on s'est décidés. Il nous semble qu'il y a là une matière intime, un peu sociologique, suisse, également, qui se prête à être traitée au théâtre, de manière sans doute un peu inhabituelle. Le problème du sport au théâtre, c'est que le sport, le geste sportif, est mieux que tout le théâtre du monde pour des raisons évidentes de suspense, de «live», d'immédiateté. Il ne faut donc pas tenter de singer le sport, de vouloir de rivaliser avec la dramaturgie du tennis, qui est un des sports où l'incertitude peut être la plus grande.

Nous avons préféré rester sur le terrain (si j'ose) du poème, du récit, et de l'impact du sport sur nous, nos vies, notre manière de regarder nos vies, nos corps, notre mort. Le sport renvoie sans cesse à l'idée de la jeunesse et donc, par rebond, à la finitude, aussi.

C’est pourquoi nous allons adopter une forme théâtrale très ancienne, très simple: l'ode. La pièce est une ode à Roger Federer, une véritable déclaration d'amour, comme le titre l'indique.

 

Quel type de texte, de dialogues avez-vous envisagé?

 

Il y a beaucoup d'auteurs brillants que le sport inspire, de Pasolini à Sloterdijk, de Hatzfeld à Daney, et aussi des philosophes comme Scala qui nous a beaucoup inspirés. Mais si on utilise les textes directement, on a un peu l'impression que l'on donne un cours. Au final, la plupart des textes sont de moi, avec des apports de plusieurs auteurs (Bastien Semenzato, Pindare, Brecht, Sarah Kane, David Foster Wallace, André Scala) pour rester si possible singulier, et pour rester fidèle à l'idée de départ : deux admirateurs de Roger Federer décident de parler de cela de la manière la plus personnelle possible. Donc j'écris une ode à ce sportif.

 

Comment rendre compte sur scène du génie et de l'aura de Federer, en évitant les clichés de type journalistiques?

 

Nous tentons précisément de ne pas être sur le même terrain, bien qu'il y ait et qu'il y ait eu de très grands journalistes sportifs, qui font basculer le sport dans une autre dimension (je pense, ici en Suisse Romande, à Christian Despont, qui a une lecture du sport très intéressante, doublé d'une écriture inspirée et exigeante). Nous allons parler de la beauté du geste, de l'instant, et beaucoup du corps.

 

Comment pensez-vous que Federer va gérer le conflit de dates entre votre spectacle et les tournois de Dubaï, Indian Wells et Miami?

 

Il viendra par surprise. Nous laisserons une place à son nom (et une autre pour Madame) chaque soir, au cas où. Ce qui est amusant, c'est que nous ne l'avons jamais vu jouer pour de vrai...

 

Enfin, un pronostic pour la saison 2013 de Federer?

 

Le Grand Chelem, au moins !

 


 

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