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VIE ET MORT DU COUPLE SUR LA SCÈNES DU POCHE
La Tribune de Genève, Lionel Chiuch, le 15 octobre 2009
Le temps détruit tout. Les couples n’y échappent pas. Même les meilleures d’entre eux, ceux à qui la vie semblait sourire, comme celui formé par Marianne et Johan. Dix ans, déjà, qu’ils se sont mariés. Ce n’est rien, dix ans. Il faudrait juste les multiplier par le nombre de petits-déjeuners communs, de remarques anodines, de gestes prévisibles, de rituels défraîchis. De l’élan initial, il ne reste au final que deux individus mis à nu, épuisés par un quotidien qui effectue son travail de sape de manière sournoise.
Parlant de Scènes de la vie conjugale, Ingmar Bergman constatait : « J’ai mis trois mois pour écrire cette œuvre, mais il m’a fallu un temps assez long de ma vie pour la vivre. » Trois mois , oui, mais pour un chef-d’œuvre qui, au final, donne sens à ce qu’il a fallu vivre.
Un décor unique Le résultat fut tout d’abord une série de six épisodes pour la télévision suédoise (disponible en DVD). Puis une pièce, mise en scène par le belge Michel Kacenelenbogen et dont l’adaptation française est signée Jacques Fieschi. Il fallait un certain culot pour traduire en langue théâtrale cette chronique sur la décomposition du couple. Et pas mal de talent pour rendre l’acuité du regard bergmanien. De tout cela, Michel Kacenelenbogen ne manque pas. Trente ans déjà qu’il se consacre au théâtre, comme acteur puis comme directeur du Théâtre Le Public. Il y a deux ans, on avait pu apprécier son Bord de mer, de Véronique Olmi, déjà programmé au Poche. Avec ces Scènes de la vie conjugale, le monologue cède la place au dialogue, porté avec une belle conviction par Muriel Jacobs et Alain Leempoel. Deux comédiens qui, selon le journal belge Le Point, « font revivre, dans un décor unique, la chambre conjugale, cet intense duel, la bataille pour la survie ou la destruction du couple, pour la liberté et la dignité ». On le voit, le metteur en scène a décidé de rétrécir la focale. D’aller voir « là où ça se passe », c’est-à-dire là où les corps se laissent aller et où les sentiments s’épuisent. Tous les espaces sont bons pour participer de la dissolution du couple, mais c’est dans la chambre, ce lieu de l’intime, que se conclut le naufrage. Pas sûr que l’on sorte, à notre tour, indemne de ces beaux draps-là…
L'AMOUR À BOUT DE SOUFFLE SELON BERGMAN Le Temps Sortir, Alexandre Demidoff 21 octobre 2009
Toujours la même histoire. Toujours les mêmes battues dans la pénombres des vives. Ingmar Bergman, comme Marguerite Duras, comme son illustre devancier Auguste Strindberg, est obsédé par le couple. Il cherche à dénouer le lien, à en comprendre le nœud, la fatalité, le contrat surtout. Dans ce couple, il y a comme une misère rentrée, peur ou passion ravalée en jeu de formes. Scènes de la vie conjugale, c’est donc ça : une variation sur le tête-à-tête, quand le désir n’est plus qu’un mot. Ou une tentation perdue. Elle, c’est Marianne. On la devine habile à raisonner : elle est juriste, spécialisée dans les problèmes de divorce. Lui, c’est Johan, il brille à l’Université. Deux têtes bien faites pour un bonheur. Sauf que Johan a la tête ailleurs : une femme l’aspire. Ordinaire comme la tombée du jour. Johan et Marianne ont d’abord été des héros de feuilleton. Ingmar Bergman l’avait conçu ainsi : un drame à l’étouffée, six épisodes au bord de l’asphyxie. « J’ai mis trois mois pour écrire cette œuvre, mais il m’a fallu un temps assez long de ma vie pour la vivre », écrit-il dans sa préface. Le téléfilm qu’il en a tiré est un sommet bergmanien : la cruauté, le trouble, tout y est. Directeur du théâtre Le Public à Bruxelles, le metteur en scène Michel Kacenelenbogen en extrait des morceaux joués par Muriel Jacobs et Alain Leempoel. Ils se dévisagent, se rident, se perdent.
COUP DE COEUR 20 Minutes, Stéphanie Monay, 12 octobre 2009
LA TERRASSE Catherine Robert, La Terrasse, septembre 2008 LE POINT M.S.L, Le Point, 2 octobre 2008 |
SCÈNES DE LA VIE CONJUGALE |